-Tribune libre- « Accélérer la rénovation énergétique »

by Maison et Energie | 03/02/2017 7 h 41 min

A l’occasion des 12èmes Rencontres pour le logement et l’immobilier qui se sont tenues fin janvier à la Maison de la Chimie à Paris, Régis Luttenauer, administrateur du groupement d’acteurs de la filière gaz Coénove, présente le point de vue de son association sur le thème de la rénovation énergétique.

Régis Luttenauer rénovation énergétique Coénove[1]

Régis Luttenauer, administrateur de Coénove.
DR

Pourquoi s’intéresser au bâtiment ? Et bien parce que ce secteur consomme plus de 40% de l’énergie en France et est responsable de 20% des émissions de gaz à effet de serre. Devant ce constat mais surtout cette potentialité à agir, la Loi de transition énergétique a fixé des objectifs ambitieux, à savoir réduire de moitié la consommation d’énergie finale en 2050 et baisser de 75% les émissions de GES. Pour le bâtiment cela va même plus loin car ce n’est pas de 75% que les émissions doivent baisser mais de 87%.
Une fois dit cela, la vraie question est donc de comment y arriver.
Dans l’existant la seule façon d’aller vers une réduction des consommations et des émissions est la rénovation. Il ne faut pas oublier non plus qu’accélérer la rénovation énergétique est également une réponse pertinente à la lutte contre la précarité. En cette période de froid que nous connaissons actuellement, nous ne pouvons ignorer les 20% de ménages français qui peinent à se chauffer convenablement comme nous le rappelle une récente étude de l’observatoire national de la précarité énergétique (ONPE). La massification de la rénovation énergétique ne doit plus être une priorité mais devenir une réalité pour le prochain quinquennat.
Bonne nouvelle, pour les ménages ayant des capacités financières, la rénovation reste toujours une priorité d’après une très récente étude Yougov pour PAP. En effet, la majorité des propriétaires (54%) sont attachés à leur logement et envisagent, en 2017, d’y réaliser des travaux de rénovation pour le rendre plus confortable et plus adapté à leurs besoins mais également dans le but de valoriser leur patrimoine. Mais ce qui les motive avant tout, c’est la nécessité de rendre leur logement plus économe en énergie (60% des propriétaires).
Cependant si le confort dicte l’envie, les considérations budgétaires sont le premier frein à la réalisation de leur projet de travaux pour 61% des Français. Il faut dès lors impulser les actions ayant le meilleur rendement coût/bénéfices.

Alors quelle sont les pistes que propose notre association :

– La première est de stabiliser les dispositifs d’accompagnement en maintenant notamment l’incitation par les aides pour faciliter le passage à l’acte. Le CITE, crédit d’impôt pour la transition énergétique, a été prolongé en 2017 mais qu’en sera-t-il au-delà ? L’eco-PTZ – prêt à taux zéro – sera lui en place jusqu’en 2018, mais ensuite ? Ces actions d’accompagnement doivent s’inscrire dans le temps, indépendamment de notre futur gouvernement. Il faut également améliorer l’efficacité de ces aides, en donnant une meilleure visibilité de leur existence à nos concitoyens car peu semblent véritablement informés des possibilités qui s’offrent à eux. Il conviendrait également de rendre ces aides plus réactives, en évitant notamment le décalage d’un an de remboursement du crédit d’impôt et donc l’avance des frais par les ménages. Sur ces points, les collectivités locales pourraient avoir un rôle fort à jouer dans le cadre des services publics de l’efficacité énergétique qui doivent se mettre en place. Un rôle de guichet unique, à la fois en termes d’informations mais également de financement, permettrait de gagner grandement en efficience.
– Au-delà de ces incitations et ce sera notre seconde proposition, pourquoi ne pas envisager un début d’obligation ? Comme cela se fait pour les habitations équipées d’un système d’assainissement autonome, pourquoi ne pas imposer, lors de chaque mutation, une obligation de travaux ? Cela pourrait être mis en place pour les logements les plus énergivores, sur la base de critères objectifs dressés par des professionnels et pourquoi pas en se référant au DPE qui fournit l’étiquette énergétique du logement. Plus globalement et afin de rationaliser l’utilisation de l’argent public au travers de ces aides, il pourrait être cohérent de flécher les aides vers les bâtis où l’impact est le plus significatif.
– Cela rejoint la troisième piste que nous souhaitons proposer et qui vise à mettre en place un véritable phasage des travaux. Il s’agit là de commencer par les travaux moins coûteux mais ayant le meilleur rendement en efficacité afin de dégager des économies importantes permettant d’investir dans d’autres travaux. Pour l’exemple, la mise en œuvre du bouquet de travaux couplant le remplacement de l’équipement de chauffage par une chaudière condensation à haute performance à l’isolation des combles permet de tendre vers 50% d’économies. Ce sont autant de gains qui peuvent ensuite être réinvestis dans le traitement de la ventilation et la qualité de l’air intérieur qui présente des enjeux sanitaires de plus en plus forts.
– Là où un vrai progrès en termes d’efficacité peut être fait, c’est dans le remplacement de l’équipement de chauffage et de production d’eau chaude associée. A ce jour, seul 20% du parc de chaudières est constitué de chaudières à condensation haute performance qui sont pourtant la référence sur le marché. Le simple fait de renouveler un équipement vétuste par une chaudière haute performance munie d’une régulation permet un gain de 30% sur la consommation et donc la facture, et une amélioration du confort. Il y a là un vrai enjeu sur l’accélération du renouvellement du parc de chaudière.
Pour conclure, nous voyons bien que si la rénovation énergétique est pourvoyeuse de confort, de gain d’énergie et donc de pouvoir d’achat pour les ménages, elle apporte également une vraie plus-value en termes de valeur patrimoniale du logement, voire de valeur verte suivant les choix opérés. C’est un facteur favorable pour l’emploi et la lutte contre la précarité qui nécessite des investissements sur le long terme de la part des pouvoirs publics mais également un engagement des acteurs privés, professionnels formés et compétents, au service d’une offre personnalisée.

Régis Luttenauer

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